Un Dieu érotique. En revisitant le mythe de Babel

Et si le mythe de Babel se renversait ? Et si la malédiction était en fait une bénédiction ­ la chute étant créatrice, la fragmentation du Même se donnant comme une chance ? Le jeu de la différence aurait alors pour fonction de préserver Dieu, de Le garder sauf de nos mots et nous préserver, du même coup, de notre prétention à Le dire entièrement. La chute de la Tour marquerait ainsi la fin de la violence pornographique. Dans le même mouvement, explique François Nault, la fin de Babel fournirait l’occasion d’un déchaînement érotique inouï. Elle instituerait en effet un nouveau rapport à l’Autre, creusant le désir par la relance infinie du manque, par le retrait du Corps.

What if the myth of Babel were turned on its head ? What if the curse proved in fact to be a blessing ­ the fall could then be seen as creative, the fragmentation of the Same as an opportunity ? The play of difference would then assume the function of preserving God from us and our pretentions to give complete expression to Him. The fall of the Tower would mark the end of pornographic violence. In one and the same movement, the fall of Babel would thus give rise to an erotic outburst never before witnessed. In effect, it would establish a new relationship to the Other, deepening the desire through the recurrent reference to that which is missing, to the Body which has been withdrawn.

p. 385-400

Auteur

NAULT François
François NAULT est professeur de théologie fondamentale à la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l'université Laval (Québec).