Dans l’œuvre de Kierkegaard, le pseudonyme occupe la fonction paradoxale de révélateur de la vérité. Après avoir distingué la pseudépigraphie de la pseudonymie, la première supposant une écriture placée sous un nom faisant autorité, ou jouissant d’une reconnaissance, la seconde supposant au contraire l’anonymat et donc l’effacement du nom, Jean-Daniel Causse montre que le pseudonyme intervient d’abord sur la scène mélancolique de l’existence de Kierkegaard lui-même, témoignant ainsi d’une façon de se faire spectateur de soi. On voit alors comment le pseudonyme, par une mise en scène de figures de soi, opère un dévoilement et fait apparaître la différence entre vivre et faire de sa vie un théâtre où on joue un rôle, ce par quoi il conduit à la question de l’incognito : si le pseudonyme met en lumière les faux-semblants de la vérité, l’incognito dit ce qu’elle est.
p. 139-146
Auteur
CAUSSE Jean-Daniel
Jean-Daniel CAUSSE (1962-2018) a été professeur d'éthique à l'Institut protestant de théologie, Faculté de Montpellier, puis professeur au département de psychanalyse de l'université Paul-Valéry Montpellier 3 et directeur du Centre de recherches interdisciplinaires en sciences humaines et sociales (CRISES - EA 4424).