Les récits de conquête conservés en Jos 1-12 sont d’une extrême violence. Les captures de certaines villes, comme Jéricho, Aï, Haçor s’accompagnent de mises à mort massives ; Jéricho est en ruine, et tous ses habitants, femmes, hommes, enfants, vieillards, boeufs, brebis, ânes sont passés au fil de l’épée. On dénombre 12 000 morts à Aï ; Haçor « la principale ville de tous les royaumes », est réduite en cendres.
Comment expliquer que Dieu tolère pareilles destructions de vies humaines ? Dieu est-il violent ? N’est-il pas le Dieu de charité et de bonté qui n’hésite pas à donner son Fils unique ? L’hérésie marcionite a évacué la question en clôturant un canon des Écritures excluant notamment l’AT. De son côté, le courant « orthodoxe », risquant une lecture polyphonique, a conservé la Bible hébraïque et les faces obscures de Dieu. Héritiers de cette tradition, nous sommes à notre tour confrontés à cette épineuse question, question d’autant plus complexe que l’on sait maintenant, par les résultats de l’archéologie, que rares sont les cité cananéennes à avoir été véritablement détruites par les tribus d’Israël. Quelle signification faut-il donner à la violence extrême du livre de Josué ? Quelles circonstances ont pu amener Israël à donner une teinte aussi guerrière à son passé ? Autant d’interrogations au travers desquelles Simon Butticaz tente de frayer un chemin de réflexion.
The conquest narratives in Josh. 1-12 are of a rare violence. The capture of some cities such as Jericho, Ai or Hazor are followed by massive killings. Jericho is in ruins, and all ist inhabitants – women, men, children, elders, oxen, ewes, asses – are put to the sword. In Ai, the number of dead amounts to 12.000 ; Hazor, « the head of all these kingdoms », is reduced to ashes. How are we to explain that god tolerates such massacres ? Is god violent ? Isn’t he the God of mercy and kindness, who does not hesitate to give his only Son ? The arcionite heresy chose to dispose of the question by opting for a canon of Scriptures which deliberately excluded the OT. For its part, the « orthodox » current took the risk of a polyphonic reading of Scriptures, thus conserving the Hebrew Bible and the obscure aspects of God. As heirs to this tradition, we are to be confronted with this thorny question – a question which is all the more complex since archazology has taught us in the meantime that very few Canaanite cities were in fact destroyed by the Israelite tribes. What significance should we therefore give to the extreme violence of the Book of Joshua ? Which circumstances could cause the ancient Israel to relate its own past in such bellicist manner ? There are the questions guiding this contribution and informing its reflection.
p. 421-427
Auteur
BUTTICAZ Simon
Simon BUTTICAZ est professeur ordinaire de Nouveau Testament et traditions chrétiennes anciennes à la Faculté de théologie et de sciences des religions et directeur de l'Institut romand des sciences bibliques (IRSB) à l'Université de Lausanne.