Émergence et herméneutique du monothéisme à partir de la notion de reconnaissance de l’autre. Un dialogue avec Jan Assmann

La question du monothéisme est toujours actuelle, vu son lien avec le phénomène de la violence. Selon l’une des thèses de Jan Assmann – la distinction mosaïque –, le monothéisme a instauré une rupture avec les autres religions via sa « conception emphatique de la vérité » et sa prétention à distinguer le vrai du faux. Ce tournant sémantique a introduit dans l’histoire un nouveau rapport au monde et à l’individu dont les répercussions se font encore sentir. L’assise de cette thèse est la présence d’une théologie exclusiviste dans les textes deutéronomistes de l’Ancien Testament. Pourtant, il existe d’autres textes qui adoptent une posture théologique d’ouverture. Ainsi, il est possible de relativiser le jugement d’Assmann focalisé sur le langage violent du monothéisme. Dans son rapport à l’altérité théologique des personnes ou des peuples considérés comme extérieurs à la communauté d’Israël (au sens large) à l’époque post-monarchique, le monothéisme débouche en fait aussi bien sur la reconnaissance que sur la méconnaissance de l’autre. Émerge alors une définition plus complexe du monothéisme. Pour penser cette donne, au-delà du seul constat de l’existence de textes inclusifs voire œcuméniques dans l’Ancien Testament, on peut recourir aux notions de reconnaissance et de mépris respectivement chez Paul Ricœur et Axel Honneth. Redéployer une herméneutique du monothéisme à partir de la notion de reconnaissance de l’autre dans l’Ancien Testament libère partiellement de la fatalité de la rupture causée par la distinction mosaïque.

Mots-clés

monothéisme, violence, identité théologique complexe, altérité théologique, reconnaissance et mépris

Emergence and hermeneutics of monotheism from the notion of recognition of the other. A dialogue with Jan Assmann

The question of monotheism is still relevant, given its link with the phenomenon of violence. According to one of Jan Assmann’s theses – the Mosaic distinction –, monotheism has created a break with other religions through its “emphatic conception of truth” and its claim to distinguish the true from the false. This semantic shift has introduced into history a new relationship to the world and the individual whose repercussions are still felt today. The basis of this thesis is the presence of an exclusivist theology in the Deuteronomic texts of the Old Testament. Yet there are other texts that adopt a theologically open approach. Thus, it is possible to relativize Assmann’s judgment focused on the violent language of monotheism. In its relation to the theological otherness of persons or peoples considered to be outside the community of Israel (in the broadest sense) in the post-monarchical era, monotheism actually leads to recognition as well as ignorance of the other. A more complex definition of monotheism emerges. To think this through, beyond the mere observation of the existence of inclusive or even ecumenical texts in the Old Testament, we can resort to the notions of recognition and contempt respectively in Paul Ricœur and Axel Honneth. Redeploying a hermeneutic of monotheism from the notion of the recognition of the other in the Old Testament frees us partially from the fatality of the rupture caused by the Mosaic distinction.

Keywords

monotheism, violence, complex theological identity, theological otherness, recognition and contempt

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p. 413-431